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Fonte de l’Arctique: L’or noir, catastrophe de l’or blanc

category russie / ukraine / biélorussie | environnement | opinion / analyse author Wednesday December 26, 2012 22:52author by Antoine Concil Report this post to the editors

L’arctique, la banquise, les ours, d’un côté, les géants pétroliers de l’autre: cohabitation impossible. Profit pour les uns, péril pour les autres. Mise en bouche d’un sujet qui deviendra l’un des plus grands enjeux écologiques des années à venir.
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L’Arctique : deux millions de kilomètres carrés de terres préservées inamovibles, une banquise de 3,5 millions de km2, enveloppant le Pôle Nord jusqu’aux limites du cercle polaire, possession de six pays (Canada, États-Unis, Danemark, Russie, Norvège, Islande), abritant une population autochtone de 4 millions d’Inuits aux modes de vie directement dépendants de leur environnement. Voilà pour le contexte purement géographique. Mais l’Arctique, dont le nom provient de la racine grecque árktos signifiant « ours », c’est aussi l’un des derniers espaces sauvages d’une telle importance, un écosystème en perpétuelle évolution, berceau d’une biodiversité exceptionnelle, et le climatiseur le plus important de notre planète. Ces caractéristiques si particulières ne l’épargnent pas des conséquences des dérèglements climatiques, dont les impacts se font ressentir dans cette région plus encore qu’ailleurs. Au cours des dernières décennies, la régression de la banquise, fondant comme neige au soleil, a dépassé toutes les projections scientifiques.

Bouleversements climatiques

Les experts ont souvent l’alarme facile, et les prévisions catastrophiques. Mais aujourd’hui, la question n’est plus de savoir si la banquise disparaîtra un jour totalement en période estivale, mais plutôt quand cela se produira. Le professeur en glaciologie de l’Université de Cambridge, Peter Wadams, estime que, dans les cinq années à venir, « la majeure partie de la surface estivale de la banquise pourrait disparaître, et que seule une poche glacière de résistance subsistera au nord de l’île d’Ellesmere. Dans 20 ans, cette poche disparaîtra à son tour, et l’Océan arctique sera totalement dépourvu de glace en été ». Les constats sont édifiants : 45 % de la banquise ont disparu ces trente dernières années [1], la vitesse de fonte de certains glaciers comme celui du Kangerdlugssuaq peut tripler d’une année sur l’autre, et le record du niveau de glace minimum a d’ores et déjà été battu en 2012. Cette accélération étonne et le phénomène est complexe à expliquer : la modification des courants marins pourrait jouer un rôle clé. « L’afflux de courants chauds dans les fjords du Groenland serait l’un des facteurs à l’origine de ces bouleversements », précise le Dr Fiamma Straneo de l’Institut océanographique de Woods Hole. Cette fonte accélérée n’est pas sans conséquence sur l’environnement. Une majeure partie des glaciers reposant sur des terres, leur disparition entraîne à la fois une hausse du niveau des mers, et la diminution de la capacité de l’Arctique à agir comme un système de climatiseur modérant les températures sur le globe. Ou comment accélérer l’engrenage infernal des dérèglements climatiques. Par ailleurs, une vaste faune sauvage est en danger, l’extinction d’un habitat accueillant ours et renards polaires, caribous, lièvres arctiques, harfangs des neiges, etc., entraînerait prématurément la disparition de toutes ces espèces.

Fonte accélérée de la banquise

Il est évident que rien ne permettra d’inverser la tendance en quelques années. Et c’est là le drame : personne ne semble vouloir prendre en considération la fragilisation de ce milieu et l’accélération exponentielle de la fonte de la calotte glaciaire. Alors qu’en 1991, les Nations unies avaient octroyées à l’Antarctique le statut de réserve naturelle mondiale interdisant toute activité industrielle sur ses terres (traité de Madrid), les grandes Nations semblent avoir adopté une toute autre posture vis-à-vis de l’Arctique. Elles se concurrencent aujourd’hui pour pouvoir exploiter les nappes souterraines de pétrole, cette richesse enfouie devenue soudainement accessible par le recul de la banquise. Plus de 40 compagnies ont entamé des recherches géologiques et sont prêtes à se disputer les moindres gouttes d’or noir du territoire. Alors que les ressources pétrolifères de l’Arctique sont estimées à trois années de consommation mondiale, les géants des hydrocarbures sont aujourd’hui prêts à investir dans des projets de plus en plus coûteux, dans les zones les plus reculées de notre planète, pour puiser dans des poches toujours plus profondes, multipliant ainsi les risques d’accident.

Prémices d’une catastrophe annoncée

Et pourtant le passé proche devrait avoir échaudé les consciences. Le 20 avril 2010, la plate-forme Deepwater Horizon, louée par British Petroleum (BP) dans le golfe du Mexique, explose. La fuite met cinq mois à être colmatée, 780 millions de litres de pétrole se dispersent dans l’océan Atlantique souillant des milliers de kilomètres de côtes, et affectant 400 espèces animales. Le 25 mars 2012, Total, annonce une fuite sur sa plate-forme gazière Elgin. Deux cents milles mètres cubes de gaz s’échappent chaque jour pendant deux mois, c’est la plus grosse catastrophe écologique jamais survenue en mer du Nord. Dans les deux cas, ces forages des plus standards étaient exploités depuis de nombreuses années par les pétroliers, très loin des complexités géologiques et géographiques d’un forage dans l’Arctique. Et si les conséquences écologiques de ces accidents sont désastreuses, et qu’il faudra compter plusieurs décennies pour en faire disparaître les traces, l’impact d’une marée noire dans le cercle polaire serait plus dramatique que partout ailleurs : les eaux froides favorisant les capacités adhésives et nocives des hydrocarbures, la pollution s’incrusterait de manière durable dans la glace, sans qu’aucune intervention humaine ne soit en mesure de réduire la pollution occasionnée. C’est alors l’ensemble d’un écosystème et d’une chaîne alimentaire qui seraient irréversiblement dégradé. Shell et Gazprom, en avance sur leurs concurrents, ont entamé leur première campagne de forage en mer de Tchouktches et de Beaufort début septembre. Trois semaines plus tard, la compagnie Shell annonçait qu’elle stoppait les travaux. Le dôme destiné à retenir les éventuelles fuites (installation devenue obligatoire depuis la catastrophe de Deepwater) était déjà endommagé. Dans la foulée, Gazprom suivait le mouvement et battait en retraite pour des raisons inconnues. Pas de forage en Arctique en 2012, rendez-vous à l’automne 2013. Mais comment doit-on envisager ce premier recul ? Avec 4,5 milliards de dollars déjà investis par Shell dans ce projet, on ne peut croire que le géant hollandais soit refroidi par la résistance passive de l’Arctique. Là où il y a du pétrole, il n’y a plus de raison, et ce premier échec ne semble être que les prémices d’une catastrophe annoncée.

Antoine Concil


[1] 3,41 Millions de km2 au 22 septembre soit 45 % de moins qu’à la même date en 1979, date des premiers enregistrements.

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